Stop au greenwashing : conférence ADEME

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Le jeudi 30 mars dernier se tenait le live “Stop au greenwashing, oui à la communication responsable”, organisé par l’ADEME (agence pour la transition écologique). 

Au programme de ces 40 minutes de conférence : présentation du principe de communication responsable, analyse de campagnes de greenwashing en opposition à des projets responsables et engagés et enfin moment d’échange ! 

Le tout dans une dynamique irréprochable que l’on doit notamment à Nathalie Croisé (animatrice du live) qui accueillait ce jour-là, deux membres du comité d’écriture du Guide 2023 de la communication durable de l’ADEME : Valérie Martin et Mathieu Janich.

Communication durable ; n. f.

“Une communication responsable, c’est une communication qui comprend qu’elle doit prendre ses responsabilités dans un contexte de transition écologique”, explique Valérie Martin lors de ce début de live. 

Elle évoque aussi la notion « d’écoute » de cette communication qui doit comprendre son milieu et ses problématiques afin d’apporter une véritable réflexion sur sa manière de créer son contenu, mais aussi de le délivrer au grand public. Une communication responsable, c’est aussi une communication de “l’urgence” comme l’explique la spécialiste. L’urgence d’agir pour notre environnement et ses habitants (humains, animaux, végétaux, …) et, de fait, d’emprunter le chemin qui permettra de préserver cet écosystème fragile.


Quatre piliers fondamentaux sont d’ailleurs présentés par Valérie Martin pour mieux comprendre ce concept de communication responsable mais aussi comment et dans quel cadre celui-ci s’opère-t-il :

  1. Engagement et cohérence des messages portés par l’entreprise et par l’ensemble de ses parties prenantes. Ce premier pilier comprend notamment la capacité des structures et/ou de leurs représentants à mettre en avant de bonnes pratiques de transition écologique dans leur communication ou leurs prises de parole.
    La cohérence demeure la notion clé, il ne peut y avoir communication responsable que si l’ensemble des messages mis en avant et adoptés par l’entreprise correspondent à une dynamique d’engagement dans la transition socio-écologique. Dans le cas contraire, on augmente grandement les risques de tomber dans des pratiques de greenwashing.

2. L’éco-socio-conception de l’ensemble des outils de communication. Faire le choix d’un imprimeur local, d’un événement proposant de la vaisselle réutilisable ou bien encore alléger vos formats audiovisuels, toutes ces actions engagées répondent aux enjeux sociaux-environnementaux intimement liés à la communication et à ses supports.

3. L’ouverture aux parties prenantes et à leur écoute “sincère et active”. Communiquer, cela veut aussi dire comprendre et échanger avec ces parties prenantes qui composent tout l’écosystème des milieux de la communication. Sans eux, les objectifs ne peuvent être atteints.

4. L’efficacité et l’éthique des affaires au sein des actions de communication. Ce n’est pas parce que la communication est responsable qu’elle n’est pas efficace, au contraire, elle se doit de l’être tout autant que la communication “conventionnelle”. 

Transparence, humilité et preuves, voilà ce que prône Valérie Martin pour atteindre un chemin “transformateur” vers une communication plus juste et durable.

Une montée en puissance du greenwashing ?

Depuis quelques années et la médiatisation de nombreux rapports écologiques tels que ceux du GIEC, la cause écologique est devenue LE domaine sur lequel il faut communiquer pour les entreprises. Campagnes aux slogans engagés, publicités teintées de vert ou collections de vêtements recyclés, les communicants ne manquent pas d’idées pour promouvoir des valeurs de respect de l’environnement et d’autrui. Mais est-ce que toutes ces actions entrent-elles réellement dans le cadre de la communication responsable ?

Quand Burger King annonce sur des panneaux publicitaires avoir trouvé la solution à la vaisselle jetable dans leurs restaurants, c’est une pratique trompeuse. Non, Burger King n’a pas eu cette idée lumineuse, c’est bien le Ministère de la Transition écologique avec sa loi anti gaspillage entrée en vigueur en janvier 2023 qui est à l’initiative de cette action (qui est en réalité une obligation, Burger King a été contraint de s’y conformer). 

Il en va de même pour Flixbus qui, dans l’une de ses publicités, montrait un bus faisant pousser des arbres sur son passage. L’argument avancé était celui des bienfaits pour l’environnement. En effet, on consomme moins de gaz à effet de serre à plusieurs dans un bus que seul dans une voiture. Cependant, on assiste ici aussi à du greenwashing. Faire croire aux utilisateurs qu’en prenant Flixbus, ils participent à la reforestation ou à faire prospérer la biodiversité est un message biaisé (un bus, même s’il transporte plusieurs passagers, pollue). D’autant qu’il existe aujourd’hui des moyens de transport plus vertueux que l’autobus (le train par exemple). 

Des exemples comme ceux-ci, il en existe bien d’autres, mais afin de lutter contre ces messages mensongers qui sèment le doute dans l’esprit des publics, plusieurs recours sont possibles comme nous l’explique Mathieu Janich.

Tout d’abord, maintenant que vous êtes éduqués sur ce concept de greenwashing, vous pouvez être celui ou celle qui fait bouger les choses. En effet, si vous rencontrez un support de communication qui vous semble tenir d’une pratique de greenwashing, vous pouvez, de vous-même, saisir le jury de déontologie publicitaire. Celui-ci ne relevant pas du cadre juridique, il ne peut sanctionner les annonceurs et les entreprises, mais les invite tout de même à corriger leurs pratiques afin qu’elles respectent les règles d’éthique en vigueur. 

Si aucun changement n’est effectué, des recours juridiques et réglementaires existent bel et bien et se multiplient d’ailleurs depuis quelques années. On peut citer à ce titre la loi climat et résilience qui a défini le concept de greenwashing comme une pratique commerciale trompeuse au sein du code de la consommation. De fait, si une entreprise est saisie par cette instance, elle encourt une amende de plusieurs millions d’euros et une obligation de communication dont les enjeux sont souvent encore plus importants pour les structures que la sanction financière.

Des exemples de bonnes conduites

Fort heureusement, le grand tableau de la publicité et de la communication n’est pas uniquement griffonné de campagnes de greenwashing, loin de là. 

De nombreuses entreprises n’ont pas attendu pour proposer des spots publicitaires engagés et venant bousculer les codes sociaux promulgués jusqu’ici par la publicité “traditionnelle”, qui est encore bien ancrée dans les esprits : publicités pour du prêt-à-porter mettant toujours en scène le même style de corps, mince et jeune ou campagnes touristiques vous intimant de faire le tour du monde à bord d’un paquebot tout équipé sans tarder ? Autant d’exemples qui montrent comme ces pratiques et codes sociaux ont été normalisés par l’univers de la publicité, alors qu’ils sont pourtant problématiques. 

Communiquer responsable, ce serait donc, comme la marque Darjeeling, mettre sur le devant de la publicité des femmes de tous les âges et de toutes morphologies. Ou bien promouvoir l’économie circulaire comme a pu le faire Decathlon avec son service de location de vélo pour enfant qui invite le consommateur à ne pas entrer dans la dynamique de surconsommation dont est victime notre société actuelle, mais bien d’économie circulaire, douce. 

En somme, il y a tout un travail de déconstruction de codes à opérer et ce changement doit se faire par où il a commencé : par la communication. 

Comme l’expliquent les deux spécialistes, un des principaux freins à la transition écologique est le greenwashing, car via les messages tronqués qu’il véhicule avec la publicité, il induit directement chez le spectateur une répétition de ses schémas de consommation.  

👉 En changeant notre manière de communiquer, nous serons donc en capacité de changer profondément les comportements humains, les dirigeant vers des pratiques plus sobres et respectueuses.

Vers un modèle de “sobriété désirable”

Malgré les actions déjà mises en place par certains organismes, la communication responsable reste encore aujourd’hui en marge. Peu nombreuses sont les entreprises aujourd’hui prêtes à mettre en place une communication engagée et cohérente. Le modèle du greenwashing compte de nombreux adeptes à qui ce système rapporte gros.

Cependant, l’expansion de ce genre de pratiques invisibilise les structures réellement engagées qui n’arrivent pas à se démarquer, comme l’explique Valérie Martin. C’est pourquoi il est primordial de sensibiliser et d’éduquer les générations actuelles de communicants et surtout les suivantes, aux enjeux de la communication responsable. 

Des mesures sont déjà prises en ce sens, preuve en est, les cursus de spécialisation ou les cours dédiés à ce concept qui se multiplient dans les formations universitaires en communication, marketing et publicité.  

Les communicants de demain devront être des professionnels avertis des problématiques socio-environnementales, capables de mettre en place des actions et des messages qui nous invitent à consommer de manière plus durable.

La course à la création de désirs toujours nouveaux menée par le greenwashing pour augmenter le profit de ses annonceurs, devra laisser sa place à une “sobriété désirable” comme le souligne Valérie Martin. Ce concept rejoint étroitement celui de la communication responsable car il renvoie au fait de créer des messages qui nous invitent à consommer avant tout ce dont on a besoin, plutôt que de promouvoir un propos venant créer de toute pièce un désir chez nous.

👉 En résumé, faire le choix du renoncement, c’est paradoxalement faire celui de l’action lorsque l’on parle communication responsable.