Comment éco-concevoir un site web ?

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Écoconception n.f : Ensemble de bonnes pratiques et procédés qui consistent à concevoir un objet, un produit ou un service ayant le moins d’impact possible sur la planète.  Vaste définition, n’est-ce pas ? En effet, l’écoconception ne désigne pas forcément des gourdes en inox ou des objets en matériaux recyclés, cela va beaucoup plus loin. Saviez-vous par exemple que le site web de Gelio était éco-conçu ?  A l’origine des émissions de 4% à 5% des gaz à effet de serre mondiaux, le numérique n’est pas exempt d’impacts négatifs et l’urgence à le transformer n’a jamais été aussi forte.  Pour mieux comprendre ce qu’est l’écoconception web et comment peut-elle s’incarner concrètement, nous avons interviewé Camille Gicquel, entrepreneuse engagée qui a permis au site Gelio de voir le jour. L’occasion de revenir sur les parti-pris et les étapes de création de ce support.  A toi Camille ! 🎤

Imaginer un site à l’image des valeurs de l’entreprise 

Camille : Le besoin initial de Murielle était simple, elle souhaitait un outil qui puisse lui permettre de faire connaître sa marque et son offre de services, un site vitrine. À l’image de ses nombreux engagements, un site éco-conçu était une évidence pour son activité, tant pour elle que pour moi !  Après plusieurs échanges concernant sa vision pour Gelio, ses valeurs, les axes de différenciation et ses besoins pour ce site, j’étais fin prête pour me lancer dans la phase d’idéation et de réalisation. Dès le début de ce processus, des questions très concrètes liées au livrable final et à son écoconception se sont posées, celle de la police par exemple. Plus son temps de chargement sera faible, moins cela demandera d’énergie à votre ordinateur pour la faire apparaître, et qui dit baisse de consommation dit moins de pollution.  Il en va de même pour les photos. Il y en avait très peu sur la première version du site Gelio mise en ligne et ce n’est pas un hasard. De la même manière que pour les polices, tout est question de l’énergie consommée pour charger un contenu ; et une photo, même si on ne s’en rend pas toujours compte, cela peut peser lourd ! Chaque fonctionnalité a ainsi été réfléchie ensemble afin que je puisse proposer la solution graphique la plus légère et vertueuse possible. Une fois tous ces prérequis en main, je me suis consacrée à la réalisation proprement dite du site tandis que Murielle élaborait les futurs textes : un véritable travail d’équipe !

Site éco-conçu, mode d’emploi 

Camille : La grande différence entre un site éco-conçu et un site “classique”, c’est la démarche réflexive sur l’impact de l’outil. Que ce soit du point de vue environnemental ou stratégique, la dynamique est la même, à savoir se poser des questions : “est-ce que cette action, cette photo va m’apporter quelque chose ?”.  Avec l’écoconception, on met en place des pratiques écoresponsables qui ont du sens, en prenant en compte notre environnement et nos problématiques : “si je fais ce choix, je sais ce qu’il engendre. Est-ce donc vraiment utile ? juste ?”.  Tout comme en RSE, l’idée est donc de conscientiser au maximum sa démarche, les contraintes qu’on choisit de se fixer et les limites qu’on s’impose, dans un but de progression. Dans le cas du site Gelio, nous avons opté pour WordPress en sachant pertinemment que ce ne serait jamais aussi performant que du “cousu main” conçu de bout en bout par un développeur. Mais l’entreprise venant de se lancer, Murielle voyait ce site comme une V1, qui lui permettrait d’affiner ses besoins et ses usages pour un futur cahier des charges de site plus ambitieux après 3-4 ans de recul. WordPress a l’avantage d’être facile à mettre en place et d’être connu par beaucoup d’usagers, ce qui était le cas de Murielle : elle pourrait ainsi faire évoluer le site dans le temps de façon assez autonome, sans avoir besoin de mettre trop les mains dans le code. D’où le choix également de recourir au builder Elementor, qui semblait le plus simple pour elle. Dans ma démarche d’éco-conception, j’ai cherché à optimiser l’outil tout en le personnalisant : nous avons exclu le thème Divi (très lourd) et j’ai cherché une alternative la plus souple possible pour m’adapter à la charte Gelio, tout en ayant un thème offrant de bonnes garanties du point de vue sécurité. Je voulais quelque chose d’assez léger, sans 12 000 fonctionnalités inutiles pour Gelio (par exemple, pas besoin de personnalisations poussées pour un site marchand alors que Gelio n’est pas une e-shop).  Suivant la même logique, nous avons volontairement opté pour une absence d’animation et de vidéo, et la charte prévoyait des images vectorielles ne nécessitant pas de jpeg ou png. Un site éco-conçu, vous l’aurez compris, c’est donc avant tout un outil à impact, porteur de valeurs pour des structures qui souhaitent se mettre en action pour impulser le changement sociétal auquel elles aspirent.

Un outil pour calculer son impact 

Comme nous l’indique Camille, la notion d’éco-conception est indissociable du concept d’analyse de cycle de vie (ACV). Cette méthode d’évaluation permet, selon plusieurs critères, de dresser un bilan environnemental d’un objet ou d’un support sur l’ensemble de son cycle de vie, donc de la fabrication… au recyclage (ou plutôt de sa réutilisation 😉) ! C’est là que cela se corse pour le cas des sites web … En effet, malgré la multiplication depuis quelques années d’outils dédiés au calcul de l’impact environnemental des sites, ceux-ci ne prenaient jusqu’à récemment pas en compte l’ensemble de leur consommation. Pour répondre à ce besoin, l’association de référence en matière d’écoconception Green IT a donc développé son propre plug-in afin d’analyser les sites dans leur entièreté. La notation se fait, par la suite, selon un éco-score allant de A (excellent) à G (très mauvais), permettant à l’administrateur du site de pouvoir facilement comprendre son impact et de décider de ses actions en conséquence.  Vous vous demandez sans doute la note de Gelio alors ? Allez, on vous laisse jeter un œil sur notre copie dans ce cas. Obtenir un A est quasi-impossible sur WordPress mais grâce au travail de Camille, les pages de notre site web obtiennent les notes de B et C (selon le nombre de photos), une performance qui ne demande qu’à être améliorée ! 

Influences et références pour un numérique plus responsable

Tout au long de notre échange, la question des inspirations de Camille dans son travail a éveillé notre curiosité. Quelles sont ses sources d’information de référence en matière d’écoconception ? Vers quel organisme aime-t-elle se tourner pour enrichir son expertise ou étoffer sa veille ?  Sans surprise, les publications de l’ADEME arrivent en tête de sa liste : elles représentent à ses yeux une mine de savoir à exploiter absolument afin de se sensibiliser et de parfaire ses connaissances liées au numérique responsable. En parlant de sensibilisation, elle nous partage même un podcast sur le marketing responsable, “slow marketing”, qu’on vous laisse découvrir sur votre plateforme préférée. Comme le soulève Camille à la fin de notre échange, dans une société où la surconsommation et “l’infobésité” prennent toujours plus de place, il est urgent de proposer de nouvelles façons de faire et de penser plus vertueuses, et l’écoconception fait partie de cette démarche. “Je crois vraiment que mon métier représente un tournant dans cette lutte” nous affirme-t-elle, et on ne peut qu’abonder dans son sens.  Alors, une nouvelle fois, un grand merci à elle pour ce travail web et cette discussion inspirante ! C’est toujours un plaisir de pouvoir échanger avec des acteurs porteurs de valeurs engagées, et c’est d’ailleurs ce qui nous fait tant aimer notre travail chez Gelio.